de HAD RF1 » Dim 2 Mar 2008 13:25
Interview de FA dans l'Equipe d'aujourd'hui :
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« Il y a du boulot »</center>
Nous sommes à deux semaines du Grand Prix d’Australie, pour l’ouverture de la saison de Formule 1(le 16mars), et au vu desessais hivernaux qui viennent de s’achever, les Renault ne semblent pas près d’inquiéter les Ferrari et les McLaren…
C’est un fait : pour l’instant, nous sommes assez loin des écuries de pointe. Je ne pense pas qu’il faille attendre de grosses performances de notre part dans la première partie du Championnat. Renault a quand même terminé la saison 2007 à une seconde et demie, voire deux secondes, au tour derrière les meilleurs. Un tel retard ne se rattrape pas en trois ou quatre mois. Après ce qu’ils ont vécu l’an dernier, ils en sont presque à repartir de zéro. Donc, voilà : pour le moment, nous avons encore beaucoup à apprendre, à découvrir, à améliorer. Et à espérer. Avant de penser aux victoires, avant de songer à batailler avec Ferrari et McLaren, il y a du boulot. D’autant que nous ne serons pas seuls derrière elles : il y a les BMW, les Red Bull et les Williams qui ne vont pas nous simplifier la vie !
Avez-vous une petite idée de ce qui vous attend à Melbourne ?
(Il esquisse une moue dubitative.) Franchement, c’est difficile à dire… On ne peut pas tirer de véritables conclusions des derniers tests hivernaux. Ferrari et McLaren, oui, bien sûr : ils sont favoris. Mais je ne suis pas certain qu’ils domineront autant qu’en 2007, qu’ils trusteront les quatre premières places à chaque séance d’essais, à chacune des phases qualificatives. J’ai l’impression que les écarts se sont globalement resserrés… Ce qui pourrait se révéler intéressant, du moins en début de Championnat. Après, tout dépendra de la capacité et du potentiel de développement des uns et des autres.
Entre l’écurie Renault que vous aviez quittée fin 2006, et celle que vous retrouvez en 2008, avez-vous noté une différence ?
Non, pas vraiment. Les gens que j’ai connus sont toujours là, pour la plupart. Leurs méthodes de travail, leur philosophie de la course n’ont pas tellement changé non plus… (Sourire.) J’ai retrouvé les bons côtés de la maison, et les moins bons aussi.
Est-ce à dire qu’ils ne se sont pas remis en question, après vous avoir vu partir chez McLaren, et après leurs modestes résultats de 2007 ?
(Il rigole franchement.) Non, je ne pense pas qu’il y ait eu de révolution ! Disons que tout est normal, comme avant. Nous allons voir ce que nous pouvons faire… La principale différence, peut-être, c’est que, fin 2006, j’ai quitté une écurie pleine de motivation et d’assurance ; nous venions de remporter deux Championnats du monde ensemble. Maintenant, suite aux déconvenues de la saison passée, on sent un léger manque de confiance dans les rangs. Tout ce qu’ils entreprennent sur la voiture, tout ce qu’ils modifient ou font évoluer, ils le font en croisant les doigts. Ils ont été tellement échaudés en 2007. Ce dont ils ont besoin, je crois, ce dont nous avons tous besoin, en fait, c’est de retrouver cette confiance.
Mais l’attitude de l’équipe envers vous a-t-elle changé, tout de même ? Ne vous manifeste t-elle pas un peu plus de respect, de reconnaissance, qu’auparavant ?
Mmmm... (Il réfléchit.) Oui, peut-être un petit peu plus qu’il y a deux ans. (Il rigole.) Il faut dire aussi qu’en cette période hivernale, pour développer la voiture à mes côtés, nous avons deux jeunes pilotes, Nelsinho (Piquet) et Lucas (Di Grassi), qui n’ont pas une grosse expérience de la F 1. Donc, je ne sais pas si l’équipe me respecte plus qu’avant, si elle me fait plus confiance, ou si…
Ou si elle a désespérément besoin de vous ?
Ce qui est sûr, c’est que tous les développements que nous avons eu à évaluer ces derniers mois, l’équipe a plutôt essayé de me les confier à moi. Alors que dans le passé, avec Fisichella par exemple, les tâches étaient partagées.
Quelque part, cette position stratégique dans l’écurie doit vous plaire. Ce rôle de leader, n’est-ce pas celui pour lequel vous vous sentez fait ?
Eh bien… (Rire enfantin.) En fait, ce que je veux surtout, c’est gagner J’aimerais avoir une voiture une seconde plus rapide que toutes les autres ! Et la vie serait plus simple. Non, sérieusement, je pense qu’à partir du moment où l’on se sent bien, où l’on aime son travail, la vie est jolie tous les jours et l’on a goût à bosser. C’est mon cas en ce moment, et dans ces conditions je peux donner beaucoup. Je me réveille chaque matin à 7 heures avec l’envie d’améliorer cette voiture. Ce n’est pas satisfaisant d’être derrière, mais la situation ne me déplaît pas. Je crois en effet qu’on me respecte pour ce que je peux apporter, et j’ai la volonté de faire progresser l’écurie. Elle le mérite. (Un temps.) Il n’empêche que j’aimerais bien gagner ! Quand je vois le mal que tout le monde se donne, si c’est pour finir dixième, au début, ça va encore aller. Mais après quatre ou cinq courses, cela ne va plus amuser grand monde.
Comment les Anglais de l’écurie, compatriotes de Lewis Hamilton, ont-ils accueilli votre retour ? Ils vous un peu “chambré” ?
Non, non, pas vraiment. Non, ils ne m’ont rien dit. (Rire.) Du moins, pas en face ! Non, je rigole, tout s’est bien passé. C’est un peu comme si nous avions pris, les uns et les autres, une année sabbatique en 2007. Nous avons sauté cette année-là. C’est comme si elle n’avait pas existé et que nous enchaînions tout naturellement sur la suite.
Lorsque vous êtes allé en Angleterre, à l’automne dernier, ne serait-ce que pour reprendre contact avec l’usine d’Enstone, avez-vous eu l’occasion d’être confronté à une certaine animosité du public anglais ?
Non, non, non. De toute façon, il n’y a pas tellement de gens qui me reconnaissent dans la rue, vous savez ! Mais je ne crois pas qu’ils seraient agressifs envers moi. Je ne pense pas qu’il y ait de problèmes.
Vous êtes heureux de pouvoir à nouveau porter les couleurs des Asturies (bleu et jaune) sur votre casque ? Les noir et gris de l’an dernier devaient obéir aux exigences de McLaren-Mercedes ?
Non, non, non, McLaren ne m’avait rien imposé. En fait, c’est moi qui avais voulu revenir à ces couleurs. Parce que mon premier casque, quand j’étais petit et que je courais en kart, lorsque j’avais trois ou quatre ans, était noir et blanc. Donc, l’an passé, j’avais essayé de reproduire mon petit casque. Je voulais le conserver cette année chez Renault. Et puis, en définitive, ça ne collait pas avec l’orange et blanc du sponsor. J’ai fait des simulations sur l’ordinateur, mais rien à faire, ce n’était pas joli, donc je suis revenu au bleu et jaune.
L’année dernière, à la même époque, vous aviez l’air tellement heureux chez McLaren… Vous étiez loin d’imaginer ce qui vous attendait, non ?
Oui, 2007 aura été une saison difficile. Mais, au mois de février l’an dernier, je pensais qu’elle serait plus difficile encore. Sur le plan sportif en tout cas. Parce que, fin 2006, les McLaren avaient du mal à intégrer la “Q3” (la phase qualificative réservée aux dix meilleurs). Donc, c’était une belle surprise pour moi de figurer sur le podium dès le premier Grand Prix. Et de remporter le deuxième. O.K., j’ai vécu une année dure, mais, au bout du compte, j’avais une voiture suffisamment performante pour me permettre d’oublier les autres problèmes. Et c’est ce que je retiendrai de l’expérience.
En fait, les difficultés ne sont pas venues d’où vous les attendiez…
Ouais ! (Rire.) Mais bon… Chaque année, c’est un pari. On jette la pièce en l’air sans savoir de quel côté elle va retomber. Quand j’ai pris la décision, au mois de novembre 2007, de revenir chez Renault, c’était pile ou face. Est-ce que j’ai eu raison ? Je n’en sais rien. J’aurais peut-être pu choisir autre chose, Toyota par exemple, et me retrouver
avec une voiture super compétitive. Qui sait ? Personne ne peut avoir de certitudes en novembre. L’année dernière, en février, je ne pouvais pas deviner ce qui m’attendait, que ce soit sur le plan technique, sportif ou humain. Je n’en savais rien et cela ne m’inquiétait pas. Je n’avais qu’une chose en tête : bosser, faire progresser l’auto et me lancer à l’assaut de la saison. Et en ce moment, chez Renault, c’est un peu la même chose…
Qu’est-ce qui a motivé votre choix de revenir, en définitive ?
Je connais Renault, je connais cette équipe, sa capacité à rebondir. Fin 2004, la voiture n’était pas extraordinaire. Et, début 2005, ils alignaient une machine pour gagner. Ils avaient réussi à le faire. Et ils l’ont refait en 2006. J’ai placé ma confiance dans leur expérience. Étant donné les possibilités qui m’étaient offertes en fin de saison dernière, un autre choix aurait été plus risqué, en un sens…
Oui, mais les Renault de 2005 et de 2006 gagnaient avec des pneus qui leur convenaient, et avec un moteur qui ne cessait d’évoluer. Or, aujourd’hui, on n’a plus le choix du manufacturier et les moteurs sont figés…
C’est vrai… La F 1 se rapproche de plus en plus du GP 2. Je ne sais pas quelle sera la prochaine étape. Je crains un peu que la F 1, à terme, finisse par ne plus incarner le summum de la technologie. Ce serait dommage. Il faut être très attentif à cela. Il se peut qu’un jour quatre ou cinq écuries, en tête, se tiennent dans une demi-seconde. Dans ce cas, cela pourrait rendre les courses très intéressantes, et la politique actuelle s’avérerait judicieuse. Mais on verra dans quelques années. Pour l’instant, je pense quand même qu’il faut faire attention…
Pour vous qui aimez la mise au point des voitures, cette restriction des paramètres susceptibles d’améliorer la performance doit être frustrante…
Oui, c’est certain. Avant, quand on posait pour la première fois la voiture en piste, si on constatait qu’elle n’était pas géniale, on avait la ressource de jouer sur les pneus, on pouvait compter sur un moteur meilleur que celui de la concurrence. Aujourd’hui, on sait qu’on ne peut plus compter sur ces solutions là. Autrement dit, si l’auto est bonne en janvier dès ses premiers tours de roue, on peut espérer faire une bonne saison. Mais, dans le cas inverse…
Avant de signer à nouveau pour Renault, avez-vous exigé de Flavio Briatore certaines garanties ?
Je lui ai simplement demandé de bosser dur, de tout faire pour que nous puissions disposer d’une bonne voiture. Je ne veux pas voir une seule personne “relax” dans cette équipe ! Je ne veux pas qu’on se dise : “Alonso revient chez Renault, donc Renault va se remettre à gagner.” Je suis revenu et je jette toute mon énergie, toutes mes forces dans
cette bataille. Mais, du côté de Flavio, il faut aussi que tout soit mis en oeuvre pour que nous puissions réussir, pour motiver les ingénieurs, pour les doter des meilleurs outils nécessaires. Et réunir un plus gros budget, si possible. Il faut absolument que nous allions tous ensemble dans la même direction.