- Le circuit :
Avant même que les pilotes n'ait déjà fait un seul tour de roue, Singapour a tout pour avoir un Grand Prix unique. Première course de l'histoire de la Formule 1 à se disputer de nuit, l'épreuve asiatique se distingue par un circuit tracé sur les bords de la marina, mélange de portions droites de distances assez moyennes et de nombreux virages à angle droit. Le fait que la course se dispute de nuit fait entrer en ligne de compte, dans les réglages, la température de la piste, assez fraîche à ce moment de la journée, un air assez lourd humide, typique du sud-est asiatique (cf: Sepang) et le vent qui peut sévir dans la portion finale du tracé, bordée par l'Océan Indien.
- Le point de vue de Pat Symonds
Introduction
Le circuit de Singapour exige des appuis aérodynamiques très élevés avec une vitesse moyenne tout juste inférieure à 170km/h et la plupart des virages abordés en seconde. Comme tout circuit urbain, la surface sera sans doute très glissante et bosselée et ce, même si près de 20% de la piste a été récemment resurfacée et devrait par conséquent être plus lisse que prévu. Les lignes blanches et autres marquages au sol viendront sans doute compliquer la tâche des pilotes, surtout en cas de pluie, ce qui est loin d’être impossible à Singapour !
Avant d’avoir effectivement pu marcher le circuit, il est difficile de savoir quelles seront les opportunités de dépassement réelles. Cela dépendra de l’état de la piste, de la largeur effective du circuit. Le pont Anderson par exemple semble très étroit alors que d’autres points du circuit semblent deux fois plus larges !
Virages 5 et 6
Le secteur le plus rapide du circuit est celui du Boulevard Raffles, où les monoplaces atteindront probablement une vitesse maximum de 290 ou 300 km/h. Ce n’est pas une ligne droite à proprement parler en raison du virage numéro 6 mais celui-ci sera abordé facilement à fond à près de 280 km/h. La sortie du virage numéro 5 sera importante afin d’avoir une bonne vitesse de pointe au virage numéro 7, qui sur le papier se présente comme une opportunité de dépassement potentielle.
Virages 10 à 14
Le secteur après la rue de St Andrews semble également être une partie du circuit intéressante. L’enchaînement, qui nous pensons correspondra aux virages 10 et 11 sur la carte de la FIA, représente quasiment un seul et même virage. Abordé en troisième, il faudra tomber un rapport et ralentir pour aborder le virage numéro 12, qui devrait se prendre à 90km/h. De là, on s’élance vers le Pont Anderson et le virage numéro 14, qui devrait être apparemment le virage le plus lent du circuit, à environ 70km/h.
Virages 19 et 20
Les chicanes 17-18 et 19-20 mènent au tunnel et au Boulevard Raffles. Cela sera sans doute un secteur très exigeant surtout s’il pleut et que les parties couvertes restent sèches.
- Données techniques :
Le circuit de Singapour, long de 5,1km semble être un des plus lents de la saison et on s’attend à voir les équipes opter par conséquent pour leur package aérodynamiques à forts appuis. Côté chronos, les temps ont été évalués autour des 1’45. Ce n’est pas le premier circuit que ING Renault F1 Team aura eu à découvrir cette saison et dans cet optique, l’équipe a mené de nombreuses simulations et a d’ores et déjà une bonne idée en ce qui concerne la mise au point de la R28. Il faudra cependant attendre les premiers roulages du vendredi pour procéder aux premiers essais grandeur nature et ainsi avoir une meilleure compréhension du circuit et de ses exigences.
Pneus : Comme à Monaco, le niveau de grip attendu à Singapour est relativement faible. Bridgestone a ainsi choisi de fournir aux équipes du plateau les pneus tendres et extra-tendres de sa gamme 2008, très similaires à ceux utilisés à Monaco, Budapest ou encore Valence plus tôt cette année. Cela permettra d’avoir un niveau de grip raisonnable alors que la piste sera sans doute très sale et donc glissante en début de week-end. Cependant, comme tous les circuits temporaires, le niveau d’adhérence ira en s’améliorant au fil des séances.
Aérodynamisme : Après Monaco, Singapour est le deuxième circuit le plus lent du championnat. L’équipe optera donc pour un package aérodynamiques aux appuis élevés afin de garantir une bonne stabilité de la voiture au freinage et optimiser sa motricité en sortie de virages lents.
Freins : Les simulations préliminaires suggèrent que le circuit sera apparemment difficile pour les freins avec une usure proche de celle subie par les systèmes de freinage à Melbourne. Ce n’est pas tant la sévérité des freinages que leur fréquence qui fait de Singapour une épreuve délicate pour les freins. Une attention toute particulière sera d’ailleurs portée au refroidissement des systèmes de freinage.
Suspensions : Le réglage des suspensions est sans aucun doute la chose la plus délicate à faire à partir des seules simulations lorsque l’on découvre un nouveau circuit. Cependant, comme tout circuits urbains avec un nombre élevé de virages lents, le grip mécanique sera déterminant et l’équipe y consacrera sans doute une bonne partie de son programme technique en début de week-end. L’objectif sera de donner aux pilotes des suspensions suffisamment souples pour avoir une voiture efficace en sortie et stable au passage des vibreurs et autre bosse.
Moteur et boîte de vitesses : Les circuits urbains ont tendance à être moins exigeants pour le moteur compte tenu du temps de pleine charge auquel le bloc est soumis mais il peut cependant être mis à rude épreuve puisqu’il est utilisé dans un mode « on-off » permanents. Des rapports de boîte courts seront utilisés pour optimiser la réaccélération et tirer le meilleur du moteur dès le bas régime. - Présentation du GP 2008 :
Fernando, à Monza, une fois encore vous avez décroché la quatrième place et marqué 5 points déterminants dans la lutte pour le championnat Constructeurs. Pouvez-vous dire que vous êtes satisfait ?
Oui, c’était une belle course, dans des conditions difficiles et nous avons réussi à tirer notre épingle du jeu. C’était loin d’être évident car nous savions que Monza serait sans doute l’épreuve la plus difficile pour nous du calendrier. Nous rentrons avec 5 points et comblons ainsi l’écart qui nous séparait de Toyota, le bilan est donc positif. C’est un peu frustrant de finir une fois de plus aux pieds du podium mais nous avons encore quatre courses à disputer…
Singapour, un nouveau circuit, première course de nuit... Vous êtes impatient ?
Impatient, oui mais surtout curieux. J’ai hâte de voir comment cela va se passer une fois sur place, à quoi va ressembler le circuit, quel sera le niveau d’éclairage et par conséquent la visibilité… C’est une course très atypique, du point de vue sportif mais aussi en termes de gestion de ce week-end de Grand Prix et j’avoue que je suis curieux.
Comment avez-vous abordé cette course ?
En termes de préparations physiques, je dois avouer que je n’ai rien fait de particulier pour cette course. Je me suis préparé comme pour n’importe quelle autre épreuve. Par contre, j’ai beaucoup réfléchi avec mon physiothérapeute et les membres de l’équipe sur la meilleure manière de gérer ce week-end de course, en termes de sommeil, notamment. J’ai finalement choisi de ne pas me caler sur l’horaire local et de rester autant que possible dans le rythme européen, que ce soit pour me nourrir ou pour me reposer. Ce sera je pense un élément important de cette course, aussi bien pour les pilotes que pour tous les membres des équipes.
Nous avons vu lors des deux dernières épreuves européennes que la pluie nous avait permis d’assister à de très belles courses. Pensez-vous que le fait ce Grand Prix se dispute de nuit va également rendre la course plus intéressante ?
Du point de vue des spectateurs, c’est certain. C’est d’ailleurs dans le souci des spectateurs que cette course en nocturne a été conçue. En ce qui concerne les pilotes, il faudra voir quelles seront les conditions une fois sur place. Nous n’avons pas pu nous entraîner dans ces conditions et il y aura un vrai travail d’adaptation à faire. Je ne suis pas persuadé que ce soit là l’avenir du sport automobile mais je suis néanmoins curieux de voir ce que cela va donner. Du point de vue technique, notre programme sera très similaire à celui que nous déroulons traditionnellement sur un nouveau circuit. De bien des manières, ce Grand Prix de Singapour est une vraie nouveauté et cela reste un défi intéressant pour toutes les équipes du plateau.
Nelson, vous avez fait une belle remontée à Monza mais finissez hors des points. Quel bilan tirez-vous de cette course qui a été difficile pour tous les pilotes du plateau ?
Oui, j’ai fait une belle remontée, j’avais un bon rythme, surtout si on considère ma charge d’essence embarquée. Alors il y a effectivement des choses dont je peux me satisfaire. Mais je finis hors des points ce qui compte tenu de la lutte que mène l’équipe pour la quatrième place aux Constructeurs est décevant. Une fois encore, les qualifications ont été déterminantes pour la suite de mon week-end et je suis bien décidé à faire mieux ce week-end à Singapour.
C’est un nouveau circuit, le Grand Prix se disputera de nuit, une première également. Etes-vous inquiet ou au contraire impatient ?
Impatient sans hésiter ! J’ai dû découvrir beaucoup de circuits cette année, ce n’est donc pas quelque chose qui m’effraie, d’autant que pour Singapour, comme pour Valence, ce sera la même chose pour tous les pilotes du plateau et il sera donc possible pour un rookie de défendre ses chances. En ce qui concerne le fait de rouler de nuit, là non plus, je ne suis pas inquiet. Je sais que les organisateurs ont fait des efforts remarquables pour garantir un niveau de visibilité comme en plein jour et je suis donc plutôt impatient de voir ce que cela va effectivement donner sur place, en configuration de course.
Avez-vous préparé cette course de manière spécifique compte tenu de son rythme un peu particulier ?
Disons qu’avec mon physiothérapeute, nous avons mis en place quelques bonnes pratiques pour ne pas permettre à mon horloge biologique de se caler sur le rythme singapourien. Des heures de sommeil clairement définies, des pratiques visant à limiter l’impact de la lumière sur mon rythme biologique, une autre gestion des repas avec notamment un gros petit déjeuner et après plusieurs petites collations plus légères... ce genre de petites choses pour essayer en fait d’être dans la meilleure forme possible.
Que pouvez-vous viser pour cette course ?
Tant que nous n’avons pas tourné, tant que je n’ai pas fait quelques tours, il est difficile pour moi de vous dire même si c’est une piste qui est susceptible de me plaire. Alors de là à dire ce que je peux viser, c’est difficile ! Une chose est sûre, je veux faire une meilleure qualification car je sais à quel point c’est primordial pour réussir son Grand Prix, plus encore, s’il s’agit d’un circuit en ville !
Pat, l’équipe a décroché une nouvelle quatrième place à Monza. Vous deviez être content de ce résultat après ce week-end très mouvementé !
Nous n’avions pas réalisé de très bons essais à Monza, nous savions donc que ce ne serait pas un circuit où nous pouvions espérer briller et nous avions attaqué ce week-end en sachant que nous avions beaucoup de travail en termes de mise au point. Les conditions météorologiques ont donc été une bonne surprise en quelque sorte. Nous n’avions pas pu beaucoup avancer dans notre programme le vendredi mais la pluie a certainement redistribué les cartes et nous avons ainsi pu tirer notre épingle du jeu. De manière générale, j’étais très satisfait de ce résultat ; nous sommes maintenant à égalité avec Toyota, ce qui était notre priorité à ce stade de la saison. Il va maintenant falloir les dépasser et garder cette quatrième place.
La stratégie mise en place pour Fernando a fonctionné à merveille. Etait-ce risqué d’opter pour les pneus pluie standard si tôt ?
Je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, encore récemment après le podium de Nelson à Hockenheim, parfois il faut savoir provoquer la chance et je crois que c’est ce que nous avons cherché à faire à Monza. Une fois qualifié en Q3 avec Fernando, nous savions que nos ambitions devaient rester modestes mais nous savions aussi que la météo pouvait encore venir perturber notre week-end. Nous avons donc essayé de garder une stratégie très ouverte avec une fenêtre de ravitaillement très grande et nous avons donc chargé lourdement nos deux pilotes. Malgré cela, la décision que nous avons prise avec Fernando restait difficile : la piste séchait, il nous fallait opter pour un type de pneus et de l’autre côté, notre radar nous montrait de possibles averses à venir. Opter pour les pneus pluie standard a donc été un pari mais avec les deux Toyota devant nous en pneus pluie extrême, il fallait tenter quelque chose et ça a finalement payé !
En deux courses, l’équipe est revenue à égalité avec Toyota. La quatrième place n’a jamais été aussi proche...
Oui, mais nous sommes toujours à égalité ! Avec le nombre de courses qui diminue doucement, c’est une bonne chose d’avoir réussi à les remonter si rapidement. Je reste convaincu que l’équilibre de notre voiture est meilleur que celui de la Toyota : mais c’est très serré, il y aura sans aucun doute des jours où ils seront plus forts que nous, d’autres au contraire où nous aurons l’avantage. Nous les avons battus à Monza mais la lutte est loin d’être finie, ce sera très disputé jusqu’à la fin de saison.
Nelson a également fait une belle course dans le peloton. Que pouvez-vous dire de sa prestation ?
Il a fait une belle course et remonté sept places, ce qui est une belle performance par rapport aux autres concurrents. Il a sans doute dû trouver cela difficile dans les premiers tours de course, compte tenu du manque de visibilité et il m’a dit à la fin du Grand Prix, que pour se repérer, il devait regarder les arbres… il ne voyait rien d’autre, ce qui est plutôt effrayant quand on y repense ! Une fois encore nous avons essayé de garder toutes nos options ouvertes avec lui et il a fait exactement ce que nous attendions de lui. Nous avons passé les bons pneus au bon moment. C’est donc une belle course et il poursuit son apprentissage en F1.
La course de ce week-end à Singapour compte beaucoup d’inconnus. Que peut espérer l’équipe ?
Singapour sera sans aucun doute très différent de Monza. C’est un circuit lent, à très forts appuis et il semble qu’en termes de vitesse de pointe, ce soit le deuxième circuit le plus lent du calendrier après Monaco. En ce qui concerne le fait de rouler de nuit, je ne suis pas particulièrement inquiet et je ne crois pas que nous remarquerons que cela se passe de nuit tellement les infrastructures seront efficaces. Nous aurons à trouver nos marques sur ce nouveau circuit, comme nous avons dû le faire à Valence ; c’est quelque chose que nous savons faire et pour laquelle nous sommes préparés.
Le planning des journées est très différent également. Cela va-t-il être bizarre de travailler très tard dans la nuit ?
C’est sans doute le plus gros défi de cette course, la gestion des hommes et de l’équipe. Nous avons travaillé avec notre équipe médicale car le décalage horaire pour ce genre de destinations est toujours plus délicat à gérer. Le fait que nous devrons plus ou moins rester dans le rythme européen ajoute encore une difficulté car notre horloge biologique risque d’être totalement chamboulée. Mais je ne suis pas inquiet, c’est simplement quelque chose que nous devons garder en tête car nous demandons toujours beaucoup de nos ingénieurs et de nos mécaniciens.
Avez-vous prévu de nouvelles évolutions pour Singapour ?
Nous utiliserons les dernières évolutions de la R28 dont notamment un nouvel aileron avant. Les années précédentes, lorsque nous travaillions en soufflerie sur la nouvelle voiture, nous avions toujours espoir de pouvoir utiliser des évolutions pour la voiture qui était en cours d’exploitation. Cette année, cela ne pourra pas être le cas compte tenu du changement de règlementation. Ce sera donc la dernière grande étape en termes d’évolutions pour la R28.