de Big One » Lun 23 Oct 2006 18:48
Ferrari s'interroge sur son organisation après le départ de Michael Schumacher
LE MONDE | 21.10.06 | 16h06
Les adieux à la piste de Michael Schumacher, dimanche 22 octobre, à Interlagos, lors du Grand Prix du Brésil, vont marquer la fin d'une époque. Etiquette oblige, Pelé, le roi du football, devait rendre hommage au Baron rouge, son homologue de la formule 1, avant l'ultime manche de la saison. Mais d'autres cérémonies de départ, concernant des éléments également importants, pourraient intervenir chez Ferrari, l'écurie, dont le septuple champion du monde est devenu l'emblème.
Ross Brawn, l'homme qui, depuis le muret des stands, murmure dans l'oreille du pilote allemand, figure parmi ceux-là. Le retrait du Britannique ne manquerait pas de malmener l'organisation quasi infaillible mise en place depuis dix ans à Maranello, le siège de l'écurie.
DEUX HOMMES CLEF
Cinq titres pilotes pour Michael Schumacher (de 2000 à 2004) et six titres constructeurs (de 1999 à 2004) : la "dream team" façonnée par Jean Todt au fil des années qui ont suivi son arrivée en Italie, le 1er juillet 1993, est détentrice d'un palmarès qui la rend unique.
Pragmatique et pétri d'une ambition qu'il assume pleinement, le patron français a bâti son équipe en récupérant le noyau dur de l'écurie Benetton, où Michael Schumacher avait décroché ses deux premiers titres mondiaux (1994 et 1995).
Deux hommes clef, transfuges de l'écurie anglo-italienne, ont constitué à partir de 1997 la garde technique rapprochée de Michael Schumacher : Ross Brawn, 51 ans, directeur technique, et le Sud-africain Rory Byrne, 62 ans, chargé de dessiner les bolides.
Ross Brawn a eu une responsabilité fondamentale dans la résurgence sportive de l'écurie italienne, dont les derniers titres, pilotes et constructeurs, remontaient respectivement à 1979 et 1983. En charge, notamment, de planifier et d'exécuter les stratégies de course, il a offert plus d'une victoire surprise au pilote allemand.
Pendant ce temps, dans le silence des bureaux d'étude, secondé par l'infinie puissance de calcul offerte par les deux souffleries de Maranello, Rory Byrne, maître dans l'art d'interpréter les contraintes aérodynamiques et pneumatiques, donnait naissance aux plus invincibles des monoplaces de l'histoire de la F1.
DÉGÂTS COLLATÉRAUX
Mais la glorieuse suprématie des Rouges a eu son revers : elle a fini par ennuyer. Sous la pression des télévisions que la chute de leurs audiences alarmait, la Fédération internationale de l'automobile (FIA) a consenti à modifier la donne réglementaire. En 2005, l'interdiction de changer les gommes en course a transformé en outsider la toute puissante Scuderia. Colosse aux pneus d'argile, elle a terminé la saison troisième, loin derrière ses concurrentes Renault et McLaren.
Alors qu'il avait annoncé son désir de retraite fin 2004 et confié à Alberto Costa, son assistant, le soin de poursuivre son oeuvre, Rory Byrne a décidé de revenir chez Ferrari début 2006, puis il annonçait, le 19 septembre, avoir renouvelé son contrat jusqu'à 2009. Aidée en milieu de saison par la décision de la FIA d'interdire aux Renault - après les avoir autorisés - l'utilisation d'un efficace système d'amortissement de vibrations (les mass dampers), la contribution du Sud-Africain au sursaut des monoplaces italiennes n'a pas été négligeable. Malgré un important déficit de points en arrivant au Brésil, Ferrari peut encore mathématiquement déposséder Renault des deux couronnes mondiales.
Le retour du designer prodigue est intimement lié au départ pressenti de Ross Brawn. Alors que l'hypothèse d'une année sabbatique a longtemps été évoquée - dans l'espoir pour lui d'occuper à terme le poste de Jean Todt -, il se murmure de plus en plus dans le paddock que le directeur technique aurait cédé aux sirènes sonnantes et trébuchantes d'une écurie adverse.
La "démoralisation" provoquée par le départ de Michael Schumacher pourrait bien provoquer d'autres dégâts collatéraux. Pressé par Luca di Montezemolo, le PDG de Ferrari, de rester une année de plus à la tête de la Scuderia pour maintenir l'homogénéité du groupe, Jean Todt lui-même s'interroge, dit-on, sur son proche avenir.
Jean-Jacques Larrochelle
Article paru dans l'édition du 22.10.06
Nous ne devrions pas tarder à connaître le nouvel organigramme de Ferrari, ce qui nous aidera à comprendre quel sera le nouveau rôle de Michael Schumacher et aussi comment le départ de Ross Brawn sera compensé.