Retranscription par l'Equipe d'une visio de De Meo donnée il y a quelques jours. Rien de bien neuf, mais il explique bien son raisonnement autour d'Alpine et on ne peut que le trouver cohérent. On comprend également en creux que l'équipe F1 était isolée au sein du groupe, et Abiteboul avec. De Meo la voulait bien plus intégrée et a préféré changé les têtes.
«Alpine est en F1 pour une éternité »
LUCA DE MEO, le patron du groupe Renault, veut rassurer sur la durée de la présence d'Alpine en Grand Prix. La F1 est au cœur de la stratégie de renouveau de la marque: des modèles sportifs et 100 % électriques.À l'aube de la saison 2021, Luca De Meo, le patron de Renault, a détaillé lors d'une visioconférence le bénéfice de l'engagement d'Alpine en Formule 1. travers ses propos, on ressent un intérêt bienvenu pour le sport automobile.
« Pourquoi Alpine en F1 ? C'est très simple… » « On m'a beaucoup questionné sur le choix d'Alpine en Formule 1. L'histoire est très simple. Après avoir rejoint la présidence de Renault, en juillet 2020, de nombreuses personnes m'ont demandé de stopper notre engagement en Grands Prix : la situation financière du groupe était compliquée et, pour certains, ce programme paraissait trop déconnecté. Disons -le : un hobby très cher et pas forcément nécessaire.
Il y avait aussi ce plan de fermer l'usine de Dieppe, où est construite l'Alpine A110, car elle n'était pas rentable telle qu'elle existe aujourd'hui. Mais Dieppe n'est pas seulement un outil industriel, c'est avant tout une véritable manufacture au sens propre du terme, capable de produire des choses incroyables. Et puis, arrêter l'A110, c'était sonner la fin de la marque Alpine !
Parallèlement, il y avait cette entité historique Renault Sport (adaptation de modèles à hautes performances), avec des ingénieurs de grand talent mais à qui l'on n'offrait pas une réelle direction de travail. En rassemblant tout cela, vous commencez à avoir une compagnie automobile qui peut se révéler très flexible et intéressante…
Mettre la F1 au cœur de ce dispositif présentait alors plusieurs avantages. Elle offre un impact marketing énorme sur des centaines de millions de personnes, si vous ne restez pas à l'arrière du peloton, bien sûr… Obtenir une telle notoriété pour la marque Alpine serait bien trop coûteux par d'autres moyens. La haute technologie de la F1 apporte aussi une crédibilité profitable à des modèles de sport. Or, depuis quarante-quatre ans que nous sommes en Grands Prix, en tant qu'écurie complète ou motoriste, croyez-vous pour autant que Renault est perçue comme une marque sportive ? Non, bien sûr ! Alpine était un choix plus cohérent. »
« Faire d'Alpine une mini-Ferrari et une mini-Tesla »« Nous souhaitons repositionner Alpine, non plus sur l'héritage et la nostalgie, mais comme un constructeur tourné vers le futur. Créer, grâce à nos ressources recherche et développement, une nouvelle génération de marque automobile 100 % électrique et attirante. On regardera Alpine comme la combinaison d'une mini- Ferrari et d'une mini-Tesla. Je suis certain que l'on peut y arriver ! J'ai déjà réussi des choses similaires par le passé :la résurrection d'Abarth chez Fiat, la gamme RS chez Audi Sport, le lancement de Cupra chez Seat.
Je suis un homme de l'automobile. Je n'allais pas être celui qui mettrait fin à quarante-quatre ans de présence de Renault en F1 ! Tant que je serai là, les gens de la F1 n'ont pas à s'inquiéter, il y a juste à travailler pour créer un business-model rentable, pour gagner et alors la F1 sera bonne pour la marque. Pour moi, c'est très clair : Alpine est en F1 pour une éternité. D'ici à 2025, nous prouverons que la marque Alpine peut faire de l'argent, y compris avec le coût que représente la F1.
« Je ne serai pas un acteur de Netflix »« J'ai eu le sentiment que nous devions orienter la Formule 1 vers une nouvelle histoire. Pour des gens qui avaient écrit l'histoire précédente avec Renault (
Cyril Abiteboul, l'ex-team principal; Jérôme Stoll, l'ex-président de Renault F1), il devenait difficile de diriger le team vers une autre direction. Je les remercie; ils ont obtenu quelques podiums mais sans être critique sur ce qui a été fait - une bonne base -, nous devions aller de l'avant. Renault F1, Renault Sport et même Alpine étaient un peu dans une zone de confort. Alpine est désormais l'un des quatre piliers que nous souhaitons mettre en avant auprès du public dans Renaulution (le plan stratégique de De Meo pour le groupe Renault). Pour cela, vous avez besoin de gens comme Laurent Rossi, qui était directeur de la stratégie et du développement business de Renault. Il connaît parfaitement le système pour combiner les atouts d'une petite unité, agile, dans un ensemble plus large. est aussi un ingénieur passionné par la Formule 1, qui aime la mécanique, et pourra avoir un regard différent. Mais, finalement, nous n'avons pas déplacé beaucoup de gens dans l'équipe : nous avons simplement renforcé notre management en chipant Davide Brivio au team Suzuki de MotoGP et promu en interne Marcin Budkowski sur un rôle de direction plus important. J'avais besoin d'une organisation du team F1 en lien plus direct avec moi.
Pour ma part, je soutiendrai le team et il sera bien que j'assiste à quelques courses -et en plus j'aime cela!-, car je crois qu'il est bien que les gens sentent qu'on se préoccupe d'eux, que la marque est derrière eux. Mais je serai plus présent comme une sorte de fan: je ne cherche pas à me mettre en avant et être un acteur de Netflix (qui diffuse depuis trois saisons une série sur la F1). Ce n'est pas mon genre. »
« Mieux coller à l'idée du développement durable »« Les constructeurs mettent l'argent en F1, sans nécessairement en obtenir toujours un retour sur investissement. J'ai donc vu d'un bon œil la politique de réduction des coûts engagée par la Fédération internationale de l'automobile, tout en conservant à la F1 ce summum de la technologie et son rôle de laboratoire pour la voiture de tous les jours. La compétition sera renforcée et c'est bon pour le show. Bien sûr, j'aimerais gagner, monter sur les podiums pour garantir notre visibilité, être certain que la marque est bien représentée pour jouer le jeu correctement… Mais la chose la plus importante est que la compétition devienne spectaculaire et pas ennuyeuse.
Je suis aussi satisfait de la voie prise par la Formule 1 sous le management de Liberty Media et la façon dont le marketing est orienté vers le digital et les réseaux sociaux avec un impact immédiat sur sa visibilité. C'est de mieux en mieux, cela nous permet d'atteindre une nouvelle génération de public. La série Netflix a, indéniablement, constitué un gros accélérateur d'attractivité envers une population plus jeune car c'est là qu'elle se trouve.
Enfin, ce sport a absolument besoin, au-delà de 2025 (et sur ce point, nous discutons des nouvelles règles sur les moteurs), de cadrer avec l'idée du développement durable. Dès que la F1 sera considérée par les leaders d'opinion ou les influenceurs comme également capable de développer une technologie efficiente pour moins d'impact sur l'environnement, alors nous serons dans la bonne direction. Ce n'est pas encore tout à fait le cas actuellement; nous devons corriger cela le plus rapidement possible. »